
Le
Palais de 1'lle
Cet
édifice dont l'étrave fend inlassablement les eaux du Thiou au cœur duquel il
a été édifié ne manque pas d'intriguer.
Par
sa position topographique sur l'axe nord-sud - Genève-Italie - qui traversait
la bourgade du Moyen Age on comprendra sans peine le rôle à la fois de pont et
de verrou qu'il a pu jouer dans l'Antiquité.
Modeste
maison forte, résidence du châtelain d'Annecy dès le XIIe siècle, le Palais
de 1'lle devint en quelque sorte « l'hôtel administratif d'Annecy »
du jour de l'installation du comte de Genève dans cette ville.
Prison, tribunal, hôtel de la monnaie, archives, siège du juge mage du
Genevois, il attira bien vite autour de lui les avocats, procureurs et notaires
qui édifièrent les ,, banches » : constructions en rez-de-chaussée en
bordure de la cour de 1'lle.
Cette
fonction devait se renforcer au moment du transfert du siège de la Maison de
Savoie à Turin, Annecy devenant alors la capitale de l'apanage du Genevois.
Jean-Jacques
Rousseau noua des relations très amicales avec le juge mage Simon qui siégeait
au Palais de 1'lle. Dans ses
« Confessions », il silhouette cet original magistrat d'une plume
aussi gentille que narquoise.
Durant
la Révolution, le Palais joua pleinement le rôle de prison qui lui était dévolu
depuis le Moyen Age et qui se prolongea jusqu'en 1865 date à laquelle fut
construite la maison d'arrêt de la rue Guillaume Fichet elle-même démolie en
1970.
Mais
à la fin du XIXe siècle, le Palais de 1'lle fut l'objet d'une vive agitation
politique ; n'avait-on pas envisagé sérieusement sa démolition au nom de
l'hygiène! Il s'en fallut de peu,
seules les difficultés financières retardèrent la mise à exécution de la décision
de la municipalité. Un classement
au titre des Monuments Historiques survint fort à propos en 1900 pour opérer
ce sauvetage in extremis.
Restauré
avec soin, l'antique Palais devait abriter la bourse du travail et la Société
philanthropique jusqu'en 1947.
Affecté
au service de la conservation du musée, celle-ci organise chaque année des
expositions, et envisage d'y aménager un « centre d'interprétation
urbain ».
Visite
du monument
Tout
comme le château, le Palais de 1'lle, tel qu'il nous apparaît aujourd'hui, est
le résultat d'une série de construction successives qui débute avec une
« maison forte » carrée de 12 mètres environ de côté. Le
rez-de-chaussée comporte quatre salles voûtées en plein cintre (A,B) utilisées
comme cachots. Au premier une
grande salle, longtemps utilisée comme salle de la justice, flanquée au nord
d'une seconde. La façade extérieure
nord donnant sur le Thiou nous montre les transformations successives apportées
à cette partie des bâtiments : par les traces des anciennes ouvertures, il est
possible de reconstituer la disposition antérieure au XVIe siècle.
L'escalier
à vis, desservant le corps de bâtiment ainsi que la loggia, ont complété la
façade au XVe siècle et facilité les accès à l'ensemble du Palais de 1'lle.
Quant aux constructions longeant le petit bras du Thiou (face sud), elles
comportent un escalier carré (E) cité au XIVe siècle, mais reconstruit au
XVIe, puis une longue série de cachots, distribués sur trois niveaux sur
rez-de-chaussée, à des hauteurs différentes de celles de la tour carrée (C)
du XIIe siècle.
L’ensemble
de cette aile, dite de la Monnaie, a été édifié dans la deuxième moitié du
XIVe siècle, époque de la création de l'atelier monétaire. Précédé du logement du geôlier (F) donnant sur la cour,
le corridor (G) dessert l'atelier, proprement dit, suivi de la réserve (D) puis
débouche sur la cour intérieure, aménagée en musée lapidaire.
La petite chapelle, triangulaire, formant la proue de 1'lle, date
vraisemblablement du XVIII siècle.